Ostensions et fête de la lecture : Limoges toujours
L’actualité propose parfois de curieux télescopages : alors que la fête de l’écrit battait son plein ce week-end au Champ de Juillet avec « Lire à Limoges », je ne pouvais m’empêcher de penser, lors de la présentation du chef de Saint-Martial à Saint-Michel-des-Lions, que l’abbaye construite autour de son mausolée avait été, du IXe au XIIIe siècle l’un des foyers les plus importants de production de l’écrit du monde occidental. Des moines copistes et enlumineurs du moyen-âge, confinés dans leur scriptorium, aux auteurs et éditeurs numériques du XXIe siècle exposant sous le chapiteau, le raccourci était saisissant…
Le maire de Limoges est dépositaire depuis le début du XIXe siècle de l’une des quatre clefs qui ouvrent la chasse de saint Martial. On me sait laïc convaincu : j’ai participé au lancement des Ostensions samedi après-midi avec l’ouverture des chasses de notre saint-patron – je rappelle que Martial figure sur les armoiries limougeaudes sculptées au fronton de l’hôtel de ville – et de saint Aurélien, le patron des bouchers ; au défilé le soir même – derrière les chasses de saint Fiacre, saint Loup et sainte Valérie – jusqu’à la cathédrale et à la cérémonie célébrée à la lueur des torches. Le lendemain, j’assistais à la grand-messe à Saint-Etienne puis à la marche vers la place de la Motte.
Plusieurs milliers de personnes ont assisté pendant ces deux jours à ces ostensions. Soit en y participant directement – derrière l’Evêque, les autorités religieuses, l’enseignement catholique et les représentants des différentes confréries –, soit en assistant à une partie des cérémonies, à l’image du Préfet de la Haute-Vienne, Raphaël Le Méhauté ou de Gérard Vandenbroucke, le président de l’agglo présent à la découverte du chef de saint Martial et à la messe du dimanche matin à mes côtés, soit enfin en se massant sur le parcours des cortèges. De la Foi à la simple curiosité, il est vraisemblable que les motivations étaient différentes. Avec une constante cependant : ces ostensions sont l’occasion de se rappeler que Limoges a une histoire, que cette histoire s’est forgée pendant deux millénaires, qu’elle a été parfois illustre – que ce soit sous l’Antiquité ou au Moyen-Âge –, que notre ville a été un berceau de l’innovation technique, des Arts, des manufactures et du syndicalisme, qu’elle a aussi connu des heures tragiques avec les répressions ouvrières de 1905… bref que Limoges est ce qu’il est convenu d’appeler une grande ville et que ces Ostensions – inscrites au patrimoine immatériel de l’Humanité – en sont l’un des témoignages.
Et sous le chapiteau ? Là aussi plusieurs milliers de personnes en deux jours. De grands et bons écrivains (Jean Rouaud, Gilles Lapouge, Yasmina Khadra, Daniel Picouly, Louis Chedid, les auteurs de U4, Didier Convard.. et tant d’autres !), des conférences très suivies et notre premier prix Régine Desforges attribué à Astrid Manfredi pour sa « Petite barbare » dont je vous recommande vivement la lecture. Au-delà, j’ai été frappé et enchanté par la vitalité extraordinaire de ce que l’on appelle les « auteurs jeunesse » : on dit nos enfants abrutis par les smartphones et autres tablettes, pour ma part j’ai constaté avec infiniment de plaisir que les écrivains de cette littérature pour garnements et adolescents étaient parmi les plus sollicités. J’en profite enfin pour féliciter les services municipaux de la culture qui ont organisé cette grande fête et qui démontrent que l’argent du contribuable limougeaud est très bien employé !